Un mois après la clôture du Forum Mondial sur l’Education à Incheon en Corée, la question du financement de l’éducation demeure l’un des enjeux principaux de la mobilisation des acteurs de la société civile français et internationaux, pour que les gouvernements s’engagent à réaliser les objectifs ambitieux affirmés dans la déclaration finale du forum.
En Juillet 2015 se tiendront à quelques jours d’intervalle le somment d’Oslo sur l’éducation pour le développement (7 juillet) et la conférence internationale d’Addis Abeba sur le financement du développement (13-16 juillet). Alors que l’éducation est peu présente dans les documents préparatoires de la conférence d’Addis Abeba, la rencontre d’Oslo est l’occasion de mobiliser les décideurs nationaux et internationaux pour inverser la tendance à la baisse globale des crédits à l’éducation. Une des annonces attendues à Oslo concerne la création d’un fonds mondial d’urgence pour l’éducation, à l’initiative de l’ancien premier ministre britannique Gordon Brown, destiné à financer l’éducation dans les périodes de crise humanitaire. Au-delà de cet élément important, la mobilisation pour le financement global d’une éducation de qualité pour tous tout au long de la vie ne doit pas faiblir. A Incheon, 19 ministres de pays en développement ont signé en marge du forum une déclaration sur le financement de l’éducation, estimant que 39 milliards de dollars annuels supplémentaires seraient nécessaires pour faire de l’objectif d’une éducation publique primaire et secondaire universelle une réalité.
Le partenariat mondial pour l’éducation (PME) occupe une place centrale dans les échanges internationaux sur le financement de l’éducation. Il constitue l’unique outil multilatéral d’envergure dédié au secteur de l’éducation. Sa directrice générale Alice Albright était à Paris le 17 juin pour rencontrer la secrétaire d’Etat chargée du développement et de la francophonie, Mme Annick Girardin, et tenter d’obtenir un engagement significatif de la France en faveur de l’éducation. A la suite de la reconstitution des ressources financières du PME en 2014 pour la période 2015-2018, la France ne s’est engagée qu’à hauteur d’1 million d’euros pour l’année 2015, une somme dérisoire au regard de son rôle historique dans la création du PME, et en comparaison de sa contribution à d’autres fonds multilatéraux sectoriels.
La France sera présente au forum d’Oslo parmi la quarantaine de pays invités, ainsi qu’à Addis Abeba. La Coalition Éducation appelle le gouvernement français à donner à l’occasion de ces grands rendez-vous un nouvel élan à sa politique de coopération et de solidarité internationale en matière d’éducation. En septembre la communauté internationale entérinera à New-York un nouvel agenda pour le développement durable ; il appartient à nos gouvernants d’envoyer cet été un signal fort pour que la vision progressiste pour l’éducation adoptée à Incheon soit confirmée et accompagnée d’engagements financiers concrets.
Alors que les crédits budgétaires français alloués à l’aide au développement dans le secteur de l’éducation n’ont fait que diminuer ces dernières années, la Coalition Éducation n’aura de cesse dans les prochains mois de rappeler le gouvernement à ses engagements. Une nouvelle édition de l’Observatoire de l’aide publique française à l’éducation dans les pays en développement est en préparation à l’approche du vote de la loi de finance pour 2016. Il proposera une analyse détaillée de la coopération éducative française, et en particulier le maintien et même le renforcement du déséquilibre entre l’aide accordée à l’éducation supérieure et l’appui à l’éducation de base.
Si le secteur privé a un rôle certain à jouer dans l’atteinte des objectifs de développement durable, le financement de l’éducation ne saurait lui être majoritairement confié, et les Etats se doivent de conserver leur responsabilité de garant de la qualité, de l’accessibilité et de l’équité dans la fourniture de services sociaux essentiels. Le rapporteur spécial des Nations Unies sur le droit à l’éducation M. Kishore Singh vient de remettre un rapport sur la privatisation et la commercialisation grandissantes de l’éducation à travers le monde, dans lequel il s’inquiète des conséquences de cette tendance sur les principes de justice sociale et de droits humains fondamentaux, en l’absence de régulations permettant de sauvegarder le statut de bien public de l’éducation. De façon générale, la société civile s’inquiète de la financiarisation du développement, qui risque d’entraîner un recul de l’aide aux pays les moins avancés et aux populations les plus vulnérables.
Les négociations préparatoires à la conférence d’Addis Abeba laissent escompter des résultats faibles en termes d’engagements de la communauté internationale pour financer le développement. La mise en œuvre des objectifs de développement durable qui seront fixés à New York en septembre constitue pourtant le grand défi du développement, en particulier dans les secteurs sociaux de base tels que la santé et l’éducation. La société civile internationale attend des rendez-vous de cet été des messages clairs et des actes de la part des gouvernants.
Rapport du Rapporteur Spécial dur le droit à l'éducation
Site officiel du sommet d'Oslo sur l'éducation pour le développement
Site officiel de la conférence internationale d'Addis Abeba sur le financement du développement