Jeudi 8 février, le premier Comité interministériel pour la Coopération internationale au développement du quinquennat (CICID) - qui définit les orientations de la politique française en ce domaine, sous la présidence du Premier ministre – a rendu ses conclusions. Un bilan positif pour l’éducation avec toutefois quelques ombres au tableau.
La Coalition Education salue les engagements financiers pris en faveur de l’éducation de base avec l’inscription de la contribution de 200 millions d’euros sur 3 ans au Partenariat mondial pour l’éducation (PME) et la subvention additionnelle de 100 millions d’euros pour l’Agence française de développement (AFD). Ces précisions répondent aux attentes de la société civile suite aux annonces du Président de la République à la conférence du PME à Dakar.
Nous accueillons également favorablement la priorité au rééquilibrage de l’aide vers les pays prioritaires et notamment l’Afrique subsaharienne ainsi qu’à l’égalité hommes-femmes. Nous plaidons pour que la politique de coopération éducative en Afrique subsaharienne soit renforcée afin de répondre aux besoins fondamentaux des partenaires et de mener des actions en co-construction de qualité, efficaces. Nous demandons également que l’objectif d’autonomisation des filles soit traduit par une approche genrée de l’accès à l’éducation.
La référence aux Objectifs de développement durable (ODD) constitue également un point important qui cependant devrait être renforcée en réaffirmant l’articulation entre les priorités et la transversalité de l’éducation pour atteindre l’ensemble des ODD.
Nous regrettons l’absence d’approche par les Droits à l’éducation.
Le retrait d’un paragraphe présent dans la version initiale sur la nécessité de soutenir le renforcement des systèmes publics performants et d’accompagner les Etats dans la régulation des acteurs privés de l’éducation nous interpelle : le phénomène grandissant de privatisation et de marchandisation de l’éducation - facteur de discrimination, d’inégalités et d’exclusions sociales -met en péril le droit de toutes et tous à une éducation inclusive de qualité. Aujourd’hui, à travers sa politique de coopération internationale, la France doit jouer un rôle de leadership dans la promotion d’une éducation publique de qualité, au niveau international.
Nous nous interrogeons sur l’impact attribué à l’action d’Expertise France (EF) dans « l’accroissement de la capacité de la France à répondre aux demandes d’appui pour la définition et la mise en œuvre des politiques publiques permettant d’atteindre les ODD » : l’impact de l’action de cet opérateur multisectoriel devrait faire l’objet d’une évaluation. Nous prônons un renforcement de l'approche sectorielle de la coopération éducative pour répondre pleinement à ces objectifs. Le lien entre l’AFD et EF est préoccupant s’il est sensé inscrire la coopération éducative dans une vision multisectorielle où l'approche métier est souvent diluée dans la simple gestion administrative de projets désincarnés et dé-professionnalisés qui ne permettent pas forcément l'efficacité recherchée.
Au niveau de l’aide au développement dans son ensemble, nous déplorons l’intégration des enjeux de régulation de la migration irrégulière dans la politique d’aide au développement. Pour nous, comme pour Philippe Jahshan, président de Coordination SUD « C’est un détournement du sens de l’aide vers des enjeux qui ne la concernent pas ».
Nous regrettons également l’absence d’une véritable loi de programmation pour le quinquennat, voire à l’horizon 2025, notamment pour l’atteinte de l’objectif présidentiel de 0.55% du RNB pour l’APD . « Le ministre de l’Europe et des Affaires étrangères avait semblé intéressé par le sujet ; force est de constater que ce projet est passé à la trappe des arbitrages interministériels. » déclare Coordination SUD.
Ce CICID marque des avancées notables pour l’éducation et l’aide au développement mais nous y notons aussi des dispositions et des zones d’ombres qui demandent des clarifications.