Annick Girardin, Secrétaire d'État au Développement et à la Francophonie, revient sur le rôle central de l'éducation dans la mise en oeuvre des Objectifs du développement durable et sur la nécessité d'y mettre les moyens adéquats.
Article mis en ligne sur le site internet de Solidarité Laïque, membre de la Coalition Éducation.
L’Agenda post 2015 que nous venons d’adopter à New York le 25 septembre dessine le monde de 2030. Aujourd’hui dans le monde, 1 personne sur 2 a moins de trente ans. Ces jeunes vivent à 90 % dans les pays émergents et en voie de développement. D’ici 2030, 400 millions de jeunes Africains vont rentrer sur le marché du travail. Les jeunes ne sont pas seulement le plus grand défi que doit affronter l’Afrique, mais aussi sa plus grande opportunité. Les jeunes gens qui risquent leur vie pour se rendre aujourd’hui en Europe ne sont pas seulement désespérés, ils sont aussi ambitieux et courageux. Cette ambition et ce courage est un atout considérable pour assurer la réalisation des ODD. Réussir le développement, c’est donc construire un avenir pour ces enfants et ces jeunes. Les ODD répondent à ce défi de deux manières.
La première c’est que l’agenda 2015 doit permettre en même temps de mettre fin à l’extrême pauvreté et de préserver la planète. C’est indispensable pour donner à chacun une vie décente, c’est-à-dire accès à l’eau, à la santé, à l’énergie, à l’alimentation. La seconde, c’est que nous avons adopté plusieurs ODD qui ciblent les plus jeunes. L’éducation est confirmée, comme dans les Objectifs du millénaire pour le développement, comme priorité pour le développement et la solidarité internationale. L’éducation et la formation, sous toutes leurs formes, formelle, informelle, académique et professionnelle, sont la condition première de réalisation de tous les droits humains et de contribution à un développement durable et équitable. En 2030, notre objectif c’est que chaque enfant ait accès à une éducation primaire et secondaire gratuite. Chaque enfant, cela veut dire aussi mettre fin aux inégalités entre les garçons et les filles. J’y suis très attachée.
Le nerf de la guerre, dans les pays pauvres, ce sera le financement des systèmes éducatifs. L'aide publique au développement doit y contribuer, bien sûr, mais il faut que les Etats prennent leurs responsabilités.
C’est le sens de l’accord d’Addis-Abeba sur le financement du développement, qui est un programme de mobilisation pour la communauté internationale. Il est nécessaire que les Etats du Sud puissent lutter contre l’évasion fiscale, pour financer les services publics comme la santé ou l’éducation. Nous ne pouvons plus nous permettre que des montants 10 fois supérieur à l’APD échappent au contrôle des Etats et ne soient pas utilisés pour l’éducation et la formation des jeunes qui, rappelons-le, est la clé pour leur permettre de trouver un travail, se construire une vie, une famille, un avenir.
Il y a un autre aspect qui me tient à cœur. C’est le développement des territoires ruraux. Les déséquilibres avec les régions urbaines sont encore trop grands dans les pays en développement. L’éducation et la formation doivent être accessibles partout, dans les villes et dans les campagnes.
La société civile est essentielle pour accompagner les pouvoirs publics et lui rappeler ses engagements. 2015 est une grande année pour le développement, c’est une année où de nouveaux objectifs sont fixés. J'ai souhaité associé la Coalition Éducation au Forum mondial sur l'éducation, car vous apportez une expertise précieuse liée notamment à votre diversité. 2015 est une grande année pour le développement, c'est une année où de nouveaux objectifs sont fixés. Mais le vrai travail, celui de la mise en œuvre, il commence maintenant. La société civile a largement participé à construire ce nouveau cadre, il faut qu’elle ait sa place dans sa mise en œuvre. Et puis, pour moi, les organisations non gouvernementales sont aussi des espaces d’innovation. J’évoquais tout à l’heure la question du financement. Elle est centrale, mais elle ne résoudra pas tout. Car l’éducation, ce n’est pas que l’école, je le sais bien moi qui vient des mouvements d’éducation populaire. J’attends donc des organisations de la société civile qu’elles poursuivent, en France et dans le monde, son ambitieux travail d’éducation à la citoyenneté. Car au-delà des chiffres, des indicateurs, nous n’aurons réussi les ODD que si chaque jeune se voit offrir la chance de devenir, réellement, un citoyen du monde.