La Coalition Éducation a mené avec le soutien de l’Agence Française de Développement et du Ministère de l’Europe et des Affaires Étrangères le projet « État des lieux et bonnes pratiques des OSC en matière d’éducation dans les pays partenaires ». Ce projet identifie des bonnes pratiques éducatives menées par les organisations de la société civile dans les pays partenaires et dresse un état des lieux concis autour de 8 thématiques afin de contribuer au renforcement des pratiques et des politiques éducatives sur ces enjeux.
Les pratiques qui démontrent des résultats probants et pertinents ont été analysées et synthétisées. L’accent est mis sur les pays d’Afrique notamment de l’Ouest et Centrale avec un focus sur les pays du Sahel, mais l’étude a pu être élargie à d’autres zones géographiques en fonction des bonnes pratiques.
Les thématiques sont :
Éducation en situations d’urgence
Éducation et défis environnementaux
Éducation inclusive
Éducation numérique
Éducation transversale
Facteurs de qualité de l’éducation
Formation professionnelle, insertion et égalité de genre
Petite enfance et préscolaire
Ce site est une publication indépendante de la Coalition Education soutenue par l’Agence Française de Développement et le Ministère de l’Europe et des Affaires étrangères et de l’Europe. Avec la contribution rédactionnelle de : AIROLDI Jeanne – Asmae | BATAILLE Chloé – Un Enfant par la main | BAUSSAN Lucas – ESSOR | BERROCHE Prisca – Bibliothèques Sans Frontières | BERTRAND Danielle – GREF | BIO Charlemagne – Action Éducation | BOHAN JACQUOT Sandrine – Humanité & Inclusion | BOISSEAU Sandra – Humanité & Inclusion | BOURGET Elsa – Secours Islamique France | BRUN Aida – Coalition Éducation | CLEMENT Louise – Coalition Éducation | COUPEZ Carole – Solidarité Laïque | DIALLO Moussa – ChildFund Sénégal | DJIAN Sadadou – Office pour le climat et l’éducation | DUPONT Nathalie – Asmae | FOUILLAND Marine – Un Enfant par la main | GADEAU Josette – GREF | GAUTIER Camille – IECD | HEIN Céline – UNICEF | JENN TREYER Véronique – Planète Enfants et Développement | KARAKIDA Guilherme – UNICEF | KAYGISIZ Derya – Save The Children | KOUADIO Joel – Green Ivory | LAURENT Marie – HAMAP Humanitaire | MALEK-BAKOUCHE Farah – Save The Children | MIGNOT Christelle – Solidarité Laïque | PEICH Muy-Cheng – Bibliothèques Sans Frontières | PERROT Michelle – Plan International France | PITIOT Anne Camille – IECD | PLESSIS Marine – Planète Urgence | RAKOTONDRAMAVO Hanta – ONG Défi | RAMBAUD Léa – Coalition Éducation | SZWARCBERG Méline – Save The Children | SERET Natacha – Asmae | TEHOU Berthe – Action Éducation | TRAORE Rosine – Action Éducation | TRICHA Anaïs – Vision du Monde | TRUBLIN Céline – Humanité & Inclusion | VOLAND Juliette – Plan International France
Dans le monde, 199 millions d’enfants, adolescent·e·s et jeunes ne sont pas scolarisé·e·s, soit 17% de la population mondiale.
L’égalité des chances dans l’accès à une éducation de qualité n’est toujours pas atteinte, et l’ODD 4.5 risque de ne pas être accompli d’ici à 2030. Une éducation inclusive « permet à tous les enfants de pouvoir apprendre ensemble dans la même école. C’est également éliminer tous les obstacles et discriminations qui pourraient nuire à leur participation et à leurs résultats ».
Bien que des progrès aient été accomplis, à l’échelle mondiale, le nombre de pays dont les lois prennent en compte les personnes les plus à risques d’exclusion scolaire est encore insuffisant : 79 % des pays pour les personnes en situation de handicap, 60 % pour les minorités linguistiques, 50 % pour l’égalité des genres et 49 % pour les groupes ethniques et autochtones. Les réalités sur le terrain sont d’autant plus complexes, notamment dans les pays à revenu intermédiaire et à faible revenu : seuls 42 % des pays d’Afrique subsaharienne sont considérés comme poursuivant des politiques inclusives dans ce domaine. Les enjeux d’inclusion sont insuffisamment intégrés dans la planification et la budgétisation des politiques sectorielles éducatives et les publics concernés peu consultés, ce qui ne favorise pas une bonne prise en compte de leurs besoins et attentes. Qui plus est, les enseignant.e.s bénéficient rarement des formations nécessaires à la mise en place d’enseignements adaptés aux besoins spécifiques des enfants.
Trop souvent les enfants et les jeunes adultes sont discriminé.e.s, stigmatisé.e.s et exclu.e.s de l’éducation en raison de leur situation de handicap, leur sexe, leur croyance religieuse, leur statut de réfugié.e, leur origine ethnique et/ou géographique. Ces facteurs de vulnérabilités les exposent à des manques d’équipement et d’accompagnement adaptés à leurs besoins au sein des établissements scolaires, y compris concernant l’accès aux services essentiels de santé. Dans le monde, 42 % des filles ont terminé l’école primaire contre 51% des garçons. Un tiers des 58 millions d’enfants non scolarisés dans le monde sont porteurs de handicap, et plus de la moitié d’entre eux vivent en Afrique subsaharienne. Trois quart des enfants vivant dans la rue ne vont pas à l’école.
Qui plus est, les personnes subissant simultanément plusieurs formes de discrimination dans la société sont victimes d’effets combinés et cumulatifs qui accroissent les risques d’exclusion scolaire. Lorsque le genre s’entrecroise avec d’autres facteurs de vulnérabilité, comme le handicap ou l’âge, l’accès et le maintien à l’éducation peut devenir encore plus difficile, d’autant plus lorsque les filles atteignent la puberté.
Dans les faits, les politiques et programmes éducatifs prennent peu en compte la question de l’intersectionnalité pour améliorer l’inclusion scolaire des enfants les plus vulnérables.
La mise en oeuvre et le suivi de ces bonnes pratiques sont conditionnés à quelques recommandations que nous détaillons ci-après :
L’environnement, la biodiversité, les ressources naturelles sont menacées partout dans le monde et cela est dû à différents facteurs : démographie, croissance économique, changement climatique… Ces menaces sur l’environnement ont déjà et entraîneront des répercussions importantes sur la vie humaine (destructions d’habitats, maladies, catastrophes naturelles, migrations subies…).
Ces problématiques environnementales affectent les systèmes éducatifs, les « apprenant.e.s » et les communautés éducatives par des difficultés d’accès à la scolarité et des troubles de la continuité éducative. En effet,
près de 40 millions d’enfants voient leur éducation interrompue par des catastrophes naturelles et des épidémies dues à des évènements météorologiques extrêmes et 503 millions d’enfants vivent dans des zones à très haut risques d’inondations.
Pour autant, l’éducation est une opportunité pour la transition écologique : outil de transformation des mentalités et des comportements, avec des effets à long terme, elle joue un rôle essentiel dans l’élaboration de solutions adéquates pour remédier à ces défis environnementaux et climatiques.
Le Rapport mondial de suivi de l’éducation de 2016 (Rapport GEM) démontre que l’éducation est au cœur du développement durable et notamment d’un environnement naturel plus sain.
Ce rapport permet de rappeler la nécessité de contribuer à l’objectif 4 des Objectifs du Développement Durable « Éducation de qualité » qui intègre en son sein une composante spécifique relative à la création d’une Éducation au Développement Durable (EDD) favorisant la citoyenneté et la préservation de la planète. L’intention est de donner le moyen aux enfants de changer leurs perceptions et leurs actions à travers des prises de conscience, des apprentissages par l’expérience et l’implication des enfants.
L’éducation doit contribuer à comprendre les problématiques environnementales, de réduire les comportements qui en sont à l’origine et de développer des actions pour répondre aux défis environnementaux. Elle est aussi « un catalyseur essentiel de tous les autres objectifs de développement durable ».
La protection et la préservation de l’environnement est l’affaire de tous et notamment des enfants et des plus jeunes générations : l’école a donc un rôle à jouer pour contribuer à répondre à l’urgence environnementale actuelle. Cependant aujourd’hui seulement 50% des Etats membres de l’UNESCO intègrent l’éducation au développement durable dans leurs programmes scolaires et moins de 40 % des enseignant.e.s interrogé.e.s par l’UNESCO et l’Internationale de l’Éducation se sentent capables de transmettre des connaissances sur le changement climatique. Au-delà de l’éducation formelle, les initiatives portées par les ONG, les organisations de la société civile, les communautés éducatives locales sont autant de solutions d’éducation non formelle, innovantes, adaptées qu’il faut inscrire plus durablement dans les stratégies et les politiques publiques de transition écologique.
Nous tâcherons ci-dessous de présenter des initiatives contribuant à apporter des solutions pour faciliter la compréhension des enjeux environnementaux et à renforcer les systèmes éducatifs, formels et non formels, sur ces thématiques.
C’est en réintégrant l’éducation dans la réponse aux objectifs de développement durable, écologiques, environnementaux mais aussi sociaux qui y sont liés, que nous obtiendrons des résultats durables, pour les générations d’aujourd’hui et celles de demain.
Il n’y aura pas de transition écologique ni de développement durable sans l’universalité du droit à l’éducation, et un accès pour toutes et tous à une éducation gratuite et de qualité tout au long de la vie.
Le droit à l’éducation est intrinsèquement lié au respect des droits de l’enfant : la convention relative aux droits de l’enfant souligne en particulier que l’épanouissement des enfants dépend d’un environnement sûr et sain.
D’ici à 2030, 25,6 millions de jeunes travailleurs âgés de 15 à 29 ans entreront sur le marché du travail, et 77 % de la population active des jeunes vivra dans les pays en voie de développement d’Afrique, d’Asie et du Pacifique. Le taux d’activité des jeunes demeure cependant globalement faible. L’OIT dénombre en 2019, 267 millions de NEET (Not in Education, Employment or Training) , soit plus d’1 jeune sur 5.
Dans le monde entier, la part des jeunes qui ne sont pas dans l’éducation, l’emploi ou la formation (NEET) n’a montré aucun signe significatif d’amélioration depuis plus d’une décennie,
tandis que les jeunes femmes continuaient d’être touchées de manière disproportionnée par rapport à leurs homologues masculins. En effet, en 2019, les jeunes femmes étaient plus de deux fois plus susceptibles que les jeunes hommes d’être sans emploi et de ne pas suivre d’études ni de formation.
La pandémie du covid-19 a infligé de multiples chocs aux jeunes. Non seulement elle détruit leurs emplois et leurs perspectives d’emploi, mais elle compromet aussi leur éducation et leur formation et, au final, a de graves répercussions sur leur bien-être mental. De plus, les confinements et les fermetures d’écoles ont nécessité une plus grande surveillance des enfants à la maison, impliquant plus souvent un abandon du travail par les femmes que par les hommes. Cela accroît encore davantage les écarts de longue date entre les sexes quant au taux de participation à la main-d’œuvre. En 2019, avant même le début de la pandémie, la participation à la main-d’œuvre des hommes d’âge mûr était de 93,5 %, contre seulement 62,1 % pour les femmes d’âge mûr. Le taux était encore plus faible pour les femmes en couple ayant de jeunes enfants.
Les économies des pays en voie de développement se caractérisent souvent par
une inadéquation entre les besoins en qualification des jeunes sur le marché du travail et une offre de formation qui puisse y répondre ;
que cela soit dans le bassin de l’emploi salarié ou celui de l’entreprenariat, dans le secteur de l’économie primaire, secondaire ou tertiaire. Par ailleurs, l’insertion et la formation professionnelle dans les pays partenaires sont souvent affectées par le manque de coordination entre les acteurs, qu’ils soient ordinaires ou spécifiques, associatifs ou étatiques. Le faible accès des personnes vulnérables aux opportunités de formations et au marché du travail (faible niveau de scolarisation, peu d’expérience, manque de confiance, etc.) et les discriminations à l’embauche au niveau des entreprises sont également constatés. Pour remédier à ces difficultés d’accès, l’Approche par les compétences ou des dispositifs plus souples et centrés sur la pratique tels que les chantiers écoles, les formations en alternance ou l’apprentissage sont encore sous-utilisés.
La mise en oeuvre et le suivi de ces bonnes pratiques sont conditionnés à quelques recommandations que nous détaillons ci-après :
La Déclaration d’Incheon cite l’éducation comme la pierre angulaire du développement et un levier d’atteinte des Objectifs de Développement Durable. L’approche basée sur les droits humains et les droits de l’enfant, et promotrice d’égalité de genre, doit être au cœur de toutes politiques et de toutes interventions éducatives. Ceci passe notamment par l’application de la Convention Internationale des Droits de l’enfant et la Déclaration universelle des droits de l’homme.
L’éducation est fondamentale pour différents enjeux comme l’insertion socio-économique, l’atténuation des effets du changement climatique, le développement économique et social, la résilience, l’égalité de genre, la nutrition, la santé et à la protection sociale ou encore le développement de la citoyenneté. L’éducation permet de doter les enfants et les jeunes des connaissances et des compétences nécessaires à la défense de leurs droits afin qu’ils puissent participer pleinement à l’atteinte des ODD.
Les fermetures d’écoles liées au Covid19 et aux crises sécuritaires et climatiques, et plus largement l’absence de lieu d’apprentissage, privent des millions d’enfants et de jeunes d’une alimentation essentielle lors des repas scolaires et augmentent les risques de maladies liés à l’hygiène et les risques liés à la protection de l’enfance, tels que les violences de genre, le mariage des enfants, le travail et la traite des enfants, ainsi que leur recrutement et leur utilisation dans les conflits armés. Les risques sont d’autant plus importants chez les adolescentes qui font face à des privations multiples et combinées qui compromettent leurs droits et leur bien-être (y compris la santé et l’éducation) et s’exposent à des risques accrus de violences, comme les grossesses précoces et les mariages forcés.
1 million de filles risquent de se retrouver privées d’éducation en raison de grossesses précoces survenues pendant la pandémie COVID-19. Plus de 230 millions d’enfants dans le monde n’ont jamais été déclarés officiellement. Sans acte de naissance, les élèves sont très tôt exclus de l’école – de nombreux pays n’acceptent pas les élèves sans acte de naissance au-delà du primaire – et ne peuvent pas accéder à l’éducation secondaire.
Par ailleurs, beaucoup d’établissements d’apprentissage ne disposent pas d’installations suffisantes pour permettre aux enfants et aux jeunes de suivre un enseignement de qualité dans un environnement adapté et en toute sécurité, garant du bien-être des élèves. En 2016, seulement 53 % des écoles ont déclaré avoir des services d’hygiène de base (définis comme une installation de lavage des mains avec de l’eau et du savon). Cela signifie que 620 millions d’enfants n’ont pas de toilettes décentes à l’école et environ 900 millions ne sont pas en mesure de se laver correctement les mains. Plus de 56 millions d’enfants d’écoles primaires dans le monde sont privés de repas scolaires, représentant pour certains enfants la seule source fiable de nourriture et de nutrition quotidienne. Face à ces nombreux défis, l’éducation constitue un levier fondamental de prévention et de lutte contre toutes les formes d’inégalités.
L’approche multisectorielle est le meilleur moyen pour s’attaquer aux divers facteurs d’exclusion, à travers des partenariats de collaboration solides et intégrés entre et par les acteurs étatiques et non étatiques.
La mise en oeuvre et le suivi de ces bonnes pratiques sont conditionnés à quelques recommandations que nous détaillons ci-après :
L’éducation en situations d’urgence peut être définie comme la fourniture d’opportunités d’apprentissage (soit la petite enfance, du primaire, du secondaire, non formel, technique, professionnel et de l’enseignement supérieur) de haute qualité et ininterrompues pour les enfants, filles et garçons, de tout âge, touché.e.s par les crises humanitaires.
Des exemples de crises courantes dans lesquelles l’éducation en situations d’urgence est essentielle comprennent les conflits, les situations de violence, les déplacements forcés, les catastrophes et les urgences sanitaires.
Il s’agit de faire en sorte que les enfants, filles et garçons, puissent apprendre, en sécurité, qu’importe leur identité, leur lieu de résidence ou ce qui se passe autour d’eux.
En situations d’urgence, l’éducation est plus que le droit d’apprendre. Elle sauve des vies en offrant une protection physique, psychosociale et cognitive aux enfants et aux adolescent.e.s, leur permettant de se remettre des effets de la crise et de retrouver un sentiment de normalité.
L’école protège les enfants des dangers physiques qui les entourent, tels que les abus, l’exploitation, le recrutement dans des groupes armés ou encore le mariage et les grossesses précoces. Elle fournit aux enfants de la nourriture, de l’eau, des soins de santé et des articles d’hygiène indispensables à leur survie et offre également un soutien psychosocial et souvent un apprentissage socio-émotionnel, en leur apportant stabilité et structure pour les aider à faire face aux traumatismes qu’ils vivent au quotidien. Les communautés, les parents et les enfants eux-mêmes donnent la priorité à l’éducation (dans une étude menée en 2015 par Save the Children «Qu’est-ce que les enfants nous disent vouloir en cas d’urgence ou de crise ?» : lorsqu’on demande aux enfants et aux parents vivant dans des situations d’urgence et de crise ce dont ils ont le plus besoin, ils répondent souvent qu’ils veulent rester à l’école). La Convention des Nations unies relative aux droits de l’enfant (CNUDE) fournit un cadre juridiquement contraignant aux États afin qu’ils garantissent le respect du droit à l’éducation pour tous les enfants, fils et garçons, dans toutes les situations, notamment de crises.
Pourtant, les enfants vivant dans des pays fragiles ou touchés par un conflit sont deux fois plus susceptibles de ne pas être scolarisés comparé à ceux des pays stables.
L’exemple du Sahel francophone (Mali, Burkina Faso, Niger) illustre de manière claire les défis existants pour garantir la continuité éducative dans des pays touchés par des crises.
Au Sahel où plus de la moitié de la population sont des enfants, la détérioration continue de la situation sécuritaire et alimentaire a engendré des pertes en vies humaines et des déplacements internes qui ont augmenté de 30% entre 2020 et 2021, atteignant 2 millions de déplacés internes. Dans cette région, les attaques et les menaces contre les écoles, les enseignant.e.s et les apprenant.e.s sont de plus en plus courantes, avec des effets dévastateurs sur l’éducation et le bien-être des enfants, mettant en danger leur avenir. Au Burkina Faso, au Mali et au Niger, plus de 8 millions d’enfants âgés de 6 à 14 ans ne sont pas scolarisés, représentant près de 55% des enfants de ce groupe d’âge. D’avril 2017 à juillet 2020, le nombre d’écoles fermées en raison des violences a été multiplié par 7. Près de 5 500 écoles sont à ce jour encore fermées en raison de l’insécurité, privant les enfants de ces écoles de leur droit à l’éducation. En plus des barrières d’accès aux écoles en raison de l’insécurité, des barrières culturelles, financières, infrastructurelles, etc, entravent l’accès à l’éducation. Par ailleurs, le système éducatif des trois pays fait face à de nombreux défis en termes de qualité, notamment en raison d’une faible qualification des enseignant.e.s, d’un faible accès à des opportunités de développement professionnel, l’insuffisance de matériel et la surpopulation des classes.
La crise sécuritaire et humanitaire affecte également directement la protection et la santé mentale des enfants. La violence et l’exploitation, y compris la violence sexuelle basée sur le genre (VSBG) augmente dans les situations d’urgence et touchent de manière disproportionnée les femmes et les filles. La région du Sahel connaît une des prévalences les plus élevées de VBG et de mariage d’enfants, avec 52% des filles au Burkina Faso, 55% au Mali et 76% au Niger mariées avant l’âge de 18 ans.
L’ensemble des recommandations et bonnes pratiques suivantes se basent sur une compréhension commune des normes du réseau inter agence d’éducation en situation d’urgence (INEE), normes INEE, qui définissent les standards minimums de qualité pour une intervention d’Éducation en Situations d’Urgence (ESU).
La mise en oeuvre et le suivi de ces bonnes pratiques sont conditionnés à quelques recommandations que nous détaillons ci-après :
La petite enfance (0-8 ans) est une étape critique du développement humain. Un développement important du cerveau, du corps et des émotions se produit au cours des premières années de la vie. Les interactions avec la famille et l’environnement au cours de ces premières années peuvent avoir un impact à long terme sur la santé physique, le bien-être social et émotionnel, les capacités cognitives ou intellectuelles et, par conséquent, sur le développement national.
La recherche a montré que l’investissement dans les premières années de la vie, avec des programmes de haute qualité pour la petite enfance, contribue fortement à l’augmentation des capacités de développement des enfants.
Malgré des progrès rapides au cours des deux dernières décennies, 37 % des enfants de 3 à 5 ans ont reçu une éducation pré-primaire dans 62 pays à revenu faible ou intermédiaire, avec de fortes inégalités entre pays; au Burkina Faso par exemple, seulement 1 enfant sur 20 fréquente la maternelle. Moins de 5 % des enfants ont accès à l’école maternelle dans certains pays touchés par un conflit.
Seulement, 51 sur 184 pays, soit 28%, ont rendu l’enseignement préprimaire obligatoire.
Parmi ceux-ci, elle est obligatoire pendant un an dans 29 pays, deux ans dans 13 et trois ans ou plus dans 9 pays. 55% des pays ont fourni aux enseignants du préscolaire des formations pendant la pandémie.
La fréquentation des établissements préscolaires varie considérablement selon des critères sociaux, économiques et culturels, notamment ceux liés aux normes de genre. Elle augmente avec l’âge, atteignant son niveau le plus élevé l’année précédant l’entrée à l’école primaire, sur laquelle porte l’indicateur mondial ODD 4.2. Les enfants défavorisés, déjà bien plus touchés par la malnutrition et la mauvaise santé, vivant dans une environnement moins stimulant, sont aussi moins à même d’accéder aux services d’éducation de la petite enfance.
Le manque d’infrastructure, la privatisation et le manque de services publics, la persistance des barrières culturelles et de la pauvreté, l’insuffisance de personnel et le manque de formation adaptée à ce niveau d’âge freinent considérablement le développement d’une éducation de la petite enfance (EPE) inclusive et de qualité.
Tous les enfants ont droit à l’éducation, comme le stipulent la Déclaration universelle des droits de l’Homme et la Convention relative aux droits de l’enfant des Nations Unies. L’éducation de la petite enfance fait partie intégrante de ce droit.
Cette vision s’inscrit dans l’objectif de développement durable 4.2 qui vise à « d’ici à 2030, faire en sorte que toutes les filles et tous les garçons aient accès à des activités de développement et de soins de la petite enfance et à une éducation préscolaire de qualité qui les préparent à suivre un enseignement primaire ». La petite enfance est définie par le Comité des droits de l’enfant des Nations unies (CDE) comme la période allant de la naissance à l’âge de huit ans.
Une éducation et une protection de la petite enfance (EPPE) de qualité et véritablement inclusives constituent la base du bien-être émotionnel et de l’apprentissage tout au long de la vie.
Les services pour la Petite Enfance sont les meilleurs investissements que puisse faire un pays car ils favorisent un développement holistique, l’égalité des genres et la cohésion sociale.
Les recherches sur l’EPPE démontrent son importance, notamment en ce qui concerne la lutte contre les inégalités y compris d’accès à l’école primaire, ses effets sur l’augmentation de la participation à l’école et la diminution des taux de décrochage scolaire. L’éducation des petits enfants est non seulement un levier pour la réussite scolaire des enfants défavorisés, mais également un moyen de lutte contre la mortalité infantile et la maltraitance et un outil pour sensibiliser les parents aux enjeux de l’éducation et à la protection sanitaire de l’enfant. Qui plus est, l’évolution de la société, y compris dans les pays partenaires, avec une croissance des femmes qui travaillent et des jeunes filles mères qui poursuivent leurs études ou souhaitent les reprendre suscite un véritable besoin de prise en charge de la petite enfance dès le plus jeune âge. Or la petite enfance n’est toujours pas aujourd’hui une priorité politique dans les pays d’interventions, malgré les besoins croissants, et son importance pour le développement humain.
La mise en oeuvre et le suivi de ces bonnes pratiques sont conditionnés à quelques recommandations que nous détaillons ci-après :
Malgré tous les efforts investis dans l’éducation pour atteindre l’objectif de développement durable 4, les constats (pré-pandémie) liés à la crise de l’apprentissage dans le monde restent alarmants et des millions d’enfants et de jeunes sont encore marginalisés : 250 millions d’enfants et de jeunes restent encore non-scolarisés. La moitié de tous les enfants des pays à revenu faible ou intermédiaire sont incapables de lire et d’écrire une phrase simple à l’âge de 10 ans (Banque mondiale, 2019). Des millions d’enfants et de jeunes se retrouvent ainsi dans l’impossibilité de développer des compétences dont ils ont besoin pour sortir de la pauvreté. La qualité et l’accès à l’éducation et les possibilités de développement des compétences sont limités, en particulier pour les enfants et les jeunes les plus marginalisés, y compris les filles, les enfants handicapés et les enfants touchés par les situations d’urgence.
Si la transformation numérique a bouleversé la société et l’économie, avec des conséquences toujours plus importantes sur la vie quotidienne, son incidence sur l’éducation et la formation était limitée jusqu’à la pandémie de Covid-19. Si le numérique, à travers l’enseignement à distance, est apparu comme la solution incontournable pour assurer une continuité éducative durant la pandémie de Covid-19, il n’en demeure pas moins que de nombreux enjeux se posent :
Le plus grand défi du numérique dans l’éducation reste la fracture numérique, qui se caractérise par des inégalités dans l’accès aux technologies de l’information et de la communication mais aussi dans les compétences en numérique. Cette fracture laisse la moitié des enfants et jeunes de côté, limitant l’accès aux mêmes opportunités que leurs pairs connectés.
Selon l’UNICEF, 3,6 milliards de personnes (soit pratiquement la moitié de la population mondiale) dans le monde n’ont pas accès à Internet.
Le manque d’accès à Internet constitue un facteur d’exclusion, qui limite les opportunités pour les enfants et les jeunes les plus vulnérables de réaliser leur potentiel.
La fermeture des écoles liée à la crise sanitaire de la COVID-19 a renforcé les réalités déjà difficiles pour les enfants et les jeunes.
Au moins un tiers des élèves – soit 463 millions d’enfants dans le monde – n’ont pas eu accès à l’enseignement à distance lorsque leur école était fermée.
Le numérique, y compris dans le cadre d’une éducation non formelle, peut constituer un formidable levier d’éducation à la citoyenneté et d’exercice même de cette citoyenneté, et donc d’émancipation, notamment pour les filles et jeunes femmes. Les enfants et les jeunes ne possèdent cependant pas toujours l’esprit critique et les informations nécessaires pour pouvoir faire face à la désinformation et aux potentielles menaces que comportent les espaces numériques, y compris les violences sexistes.
Dans un monde de plus en plus connecté mais aussi de plus en plus instable (crises sécuritaires, crise sanitaire, crise climatique, etc. qui menacent quotidiennement l’éducation),
le numérique peut permettre de construire des systèmes éducatifs plus résilients, à condition que les investissements, la volonté politique, et la mise en œuvre de stratégies spécifiques le permettent.
La mise en oeuvre et le suivi de ces bonnes pratiques sont conditionnés à quelques recommandations que nous détaillons ci-après :
Le PASEC dresse un constat inquiétant sur les performances des systèmes éducatifs de 10 pays d’Afrique subsaharienne francophone. La grande majorité des élèves ne dispose pas des compétences attendues à la fin du cycle primaire. Pour certains pays, cette situation est alarmante.
En examinant également les facteurs de la réussite scolaire dans les pays concernés, le rapport constate que la faible performance des élèves est liée à l’absence d’alphabétisation des parents, l’entrée tardive à l’école, les conditions de scolarisation dans les zones rurales, le manque de qualification des enseignant.e.s et de ressources.
387 millions d’enfants en âge de fréquenter l’école primaire, soit 56 % d’entre eux, ne possèdent pas les compétences de base en lecture.
Ce chiffre s’élève à 81 % en Asie centrale et en Asie du Sud, à 87 % en Afrique subsaharienne, mais ne représente que de 7 % en Europe et en Amérique du Nord.
Selon l’ évaluation, les professeur.e.s se déclarent insatisfait.e.s de la qualité des programmes scolaires, des infrastructures, de la disponibilité des fournitures scolaires et de leur salaire.
Par ailleurs, les enseignant.e.s jouent un rôle essentiel dans l’amélioration de l’apprentissage. Au-delà de tout autre facteur scolaire,
la qualité de l’enseignement est l’élément le plus important de l’apprentissage des élèves, «en veillant à ce qu’ils soient qualifiés, motivés et bien soutenus».
Qui plus est, la pandémie de Covid-19 a fortement impacté les systèmes éducatifs, en accroissant les inégalités d’accès aux apprentissages de qualité. Même avant le COVID-19, plus de la moitié des enfants de 10 ans dans les pays à revenu faible ou intermédiaire ne pouvaient pas lire une histoire simple. Ce phénomène a été exacerbé par la pandémie et atteint désormais 70%. De nouvelles données publiées par la Banque mondiale, l’UNESCO et l’UNICEF montrent que la génération actuelle d’étudiants pourrait désormais perdre environ 17 000 milliards de dollars de revenus à vie – contre 10 000 milliards de dollars auparavant – si cette crise des apprentissages n’est pas résolue.
La productivité de 56 % des enfants du monde sera deux fois moindre que ce qu’elle pourrait être s’ils bénéficiaient d’une éducation de qualité et d’un bon état de santé.
Scolariser les enfants ne suffit pas, si la qualité de l’éducation et de l’environnement d’apprentissage, notamment communautaire, n’est pas assurée.
Réfléchir aux facteurs contribuant à la qualité de l’éducation nécessite d’adopter une vision holistique et intégrée.
Save the Children, sur la base de son expérience de travail en éducation avec les enfants, les familles et leurs communautés, a développé le « Cadre d’Apprentissage de Qualité » (Quality Learning Framework en anglais) qui décrit sa meilleure compréhension de ce qui constitue une éducation de base de qualité. Ce cadre d’apprentissage met en avant le rôle clef d’une approche holistique afin d’assurer la qualité de l’éducation que reçoivent les enfants. Il servira de cadre de référence pour la présentation des bonnes pratiques de cette fiche.
La mise en oeuvre et le suivi de ces bonnes pratiques sont conditionnés à quelques recommandations que nous détaillons ci-après :